le choix
Le mythe de l'homme qui part
De retour de Notre Dame des Fleurs, dans le bruit du moteur un visage change
à mesure que d'anciennes pensées reviennent.
La
voiture qui est garée dans le silence, nuit noire et ses pas qui marquent
le grès jaune de la Galerie.
Il monte un petit escalier feutré.
Il s'arrête dans une première chambre vérifier la respiration
de son fils, redresser un oreiller.
Puis dans la seconde, passer une main sur le front chaud de sa fille et
éteindre la lampe.
Dans la dernière salle, la Femme dont je suis l'idée, feint
le sommeil et son visage quitte peu à peu le sourire de Procné.
Sans un mot, je dérape sous les draps et ma respiration forcée
calme les battements fous de mon coeur ; puis mes mains glissent sur mes
draps fins, à moi reprisés si finement qu'ils donnent une plus
haute idée du soin de l'ouvrière.
Je compte plusieurs fois les jours de la semaine à venir sur mes doigts
qui se retirent du linceul : j'ai constaté que les vivants étaient
bien à leur place et je vais me lever pour vérifier que les
morts ne le sont pas moins.
Je me lave lentement et je redescends m'habiller avec soin comme un jour
de semaine; la porte du Jardin est ouverte. Il y a dans une brouette, assis
et débordant, un cadavre bouffis, gonflé de jaune, de vert
et de vent qui tente de parler, comme ivre et fatigué .
Je n'y prête aucune attention.
Je me dirige vers la piscine, un enfant fasciné par les ondes joue
sur ses trois doigts un air d'accordéon .
Je m'agenouille et je soulève le couvercle du filtre.
J'entends la chanson de l'eau verte qui coule :
"Princes, les menuets où lentement on bouge
Les dansez-vous encore ?
Les dansez-vous encore avec vos talons rouges
Au royaume des morts ? "
Il n'y a pas de réponse, une allée lumineuse plantée
de grands arbres attend.
Marc Godart juillet
2000
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